Longtemps convaincu de l’incompatibilité entre vivre et penser, l’intellectuel français se rebiffe à partir des années 30. En réaction à ses prédécesseurs tels Durkheim ou Bergson, entièrement sacrifiés à leur œuvre, il déserte le cabinet pour se lancer à corps perdu dans l’existence.
Et, plaçant désormais sa vie personnelle sous le patronage de ses idées, il s’érige en prescripteur de valeurs tous azimuts.
(Auto)mystification, répond François de Negroni qui, sur la base de témoignages et confessions recueillis à la source, dévoile magistralement les enjeux cachés de cette nouvelle trahison des clercs, tout au long du stupéfiant parcours qui conduit de la République des Professeurs à Bernard-Henri Lévy.
Existentialistes adonnés à la « fiesta », à l’amour libre ; intellos chevelus des années 60-70 s’essayant à la défonce, au jouir sans entraves ; modernes beaux gosses médiatiques qui font triompher leur look culturel savamment branché, de l’Afghanistan aux rubriques culinaires de Elle.
Cumulant la séduction avec son statut traditionnel d’ordonnateur du savoir, l’intellectuel va enfin éclipser, comme modèle existentiel, l’artiste et l’écrivain, ses rivaux de toujours. Mais cette victoire mondaine ne correspond-elle pas, sur fond de défaite de la raison, à la mise en place dans la classe moyenne des dispositifs idéologiques de la contre-révolution libérale libertaire ? Vingt ans après la première publication du Savoir-vivre intellectuel, la question n’a cessé de renforcer sa pertinence.
Le savoir-vivre intellectuel
FRANÇOIS DE NEGRONI
240 pages
18,30 euros
Référence : 2-915854-05-X
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